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Quelle valeur juridique pour les mentions comme “lu et approuvé” ?

Dans notre vie personnelle ou professionnelle, nous sommes tous amenés à signer des contrats. Avec des clients, des fournisseurs, notre employeur ou nos salariés, notre banque ou assurance, notre fournisseur d’Internet ou de téléphonie mobile…

Si le paraphe permet de justifier de la prise en compte de chaque page et de leur non-modification post-signature des contrats manuscrits, il n’a aucune valeur juridique dans le cadre de la signature électronique, puisque toutes les pages appartiennent au même fichier, mais il conserve sa place dans nos esprits.

Qu’en est-il des mentions manuscrites, comme la mention « lu et approuvé », qui persiste sur un grand nombre de contrats papiers que nous signons chaque année ?

Dans nos us et coutumes, cette mention peut être apposée à la main en fin de contrat, afin d’attirer l’attention du signataire sur l’engagement qu’il va prendre. Nous pouvons cependant nous interroger sur l’utilité et la valeur légale de cette mention dans les contrats papiers que nous signons.

Les contrats peuvent prendre deux formes : les actes sous seing privé et les actes authentiques. Ces derniers sont des actes signés par un officier public, tel qu’un notaire ou un huissier. Autrement dit, les actes sous seing privé représentent la très grande majorité des contrats que nous signons. C’est donc à ceux-ci que nous allons nous intéresser.

Quelle est l’origine de la mention « Lu et approuvé » ?

Cette habitude de mentionner « lu et approuvé » avant la signature des parties trouve son origine dans le Code civil de 1804.

En effet, son article 1326 prévoyait que :

Le billet ou la promesse sous seing privé par lequel une seule partie s’engage envers l’autre à lui payer une somme d’argent ou une chose appréciable, doit être écrit en entier de la main de celui qui le souscrit ; ou du moins il faut qu’outre sa signature, il ait écrit de sa main un bon ou un approuvé, portant en toutes lettres la somme ou la quantité de la chose. Excepté dans le cas où l’acte émane de marchands, artisans, laboureurs, vignerons, gens de journée et de service.

Cet article a pourtant été modifié par une loi du 13 juillet 1980.

Depuis, la mention « bon ou approuvé » n’est plus requise, l’inscription manuscrite en cas de reconnaissance de dette se limitant à l’écriture de la somme ou la quantité de la chose faisant l’objet de l’engagement, outre la signature de celui qui souscrit (cf. article 1376 du Code civil).

Que dit la jurisprudence sur la mention « lu et approuvé » des actes sous seing privé ?

Position de la Jurisprudence et de la doctrine concernant la mention “Lu et approuvé”.

Même avant l’abrogation de l’article 1326 du Code civil lors de la réforme du droit des contrats en 2016, la jurisprudence était claire sur le fait que la mention « lu et approuvé » n’a pas de portée juridique.

En ce sens, un arrêt de la Cour de Cassation de 1993 souligne qu’en matière d’actes sous seing privé, cette mention « constitue une formalité dépourvue de toute portée ».

Un autre, de 2008 cette fois, précise que « en dehors des exceptions prévues par la loi, l’acte sous seing privé n’est soumis à aucune autre condition de forme que la signature de ceux qui s’y obligent ».

Mieux encore, le défaut de la mention « Lu et approuvé » précédant la signature n’est pas retenu comme un indice prouvant le défaut de consentement à l’acte en cause (Cass. 2e civ. 17-1-2019 n° 18-11.061 D).

Néanmoins, le Ministère de la Justice a publié dans le journal officiel du Sénat du 22 juillet 1993 que :

Si la formule « Lu et approuvé », a l’avantage, en pratique, d’appeler l’attention du signataire d’un acte sous seing privé sur l’importance de son geste, cette mention a toujours été considérée du moins en ce qui concerne les contrats synallagmatiques comme une formule de pure faculté dont l’apposition n’est requise ni pour valider l’acte ni comme élément de preuve et ne saurait a fortiori suppléer l’absence de signature des parties.

La seule portée de l’inscription de la mention “Lu et approuvé”, en pratique, consiste donc en une prise de conscience plus importante de l’engagement du cocontractant.

Quid des mentions manuscrites à l’ère de la signature électronique ?

Avec l’arrivée des nouvelles technologies, nous signons désormais nos contrats de différentes manières. La signature électronique permet aujourd’hui aux entreprises de s’adapter aux problématiques actuelles de manque de temps, de réduction des coûts, et de nouvelles expériences clients avec un besoin de signer n’importe où et n’importe quand.

Signer à distance, sur une tablette ou directement en ligne permet de proposer aux consommateurs cette nouvelle expérience, plus pratique sans dégrader nécessairement la relation humaine.

Nous l’avons vu, la mention « lu et approuvé » n’a aucune valeur légale dans le document papier. C’est bien la signature de l’acte qui confère la validité d’un contrat. La signature électronique, elle, permet d’engager une ou plusieurs parties autour d’un document.

Le contrat signé électroniquement permet de valider tous les termes de ce dernier à la virgule près. Ainsi, la mention « lu et approuvé » n’a pas plus de sens que pour un contrat papier.

Dans un contrat signé électroniquement, la mention “Lu et approuvé” n’a pas plus de valeur ni de sens que pour un contrat papier.

L’alliance de la signature électronique et des traditions.

Afin de respecter les us et coutumes de nos contrats, tout en se digitalisant, pourquoi ne pas inclure les mentions que nous avions l’habitude d’ajouter ?

Par exemple, pour matérialiser le fameux « lu et approuvé », il est possible de proposer aux utilisateurs différentes tactiques.

  • La case à cocher
  • Le bouton qui ajoute la mention au contrat
  • La possibilité de donner la main au client au moment de la signature, pour qu’il saisisse lui-même la mention dans son intégralité

Une pratique répandue est d’accompagner la mention ainsi dactylographiée dans le contrat :

“Cette mention a valeur de mention manuscrite qu’elle remplace dans le cadre de la dématérialisation de ce contrat. Je reconnais cette situation, l’accepte et comprends la signification et la portée de cette mention écrite.”

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